vendredi 27 septembre 2013

L'eau de Cognac pour brasser

Note : mise à jour de l'article du 8/05/2016

L'eau reste l'ingrédient principal de toute bière, c'est 90% du breuvage final.

Le type d'eau a disposition est une valeur de base pour la bière que l'on réalise. Selon l'eau on peut brasser plus ou moins facilement certains types de bières. L'excellente bible "How to brew" de John Palmer (Anglais) est une source inépuisable d'informations sur le brassage et un important chapitre revient sur l'eau. On trouve aussi pas mal d'informations sur le wiki BrauKaiser.

J'ai donc pris mon courage a deux mains pour tenter de débroussailler un peu le terrain et comprendre un peu la chimie de la bière et de l'eau. Selon l'auteur et diverses autres sources, le type d'eau détermine fortement le type de bière la plus adaptée. Même si certains retouchent leurs eaux (avec ajout de minéraux, d'eau distillée voir même d'acides) je m'oriente pour ma part sur une bière strictement naturelle sans ajouts, ni retouches chimiques.

Analyse de l'eau

    Un paramètre fondamental est le pH du brassin. Le pH mesure l'acidité du mélange. Pour que la chimie s'opère correctement un pH de 5.5 à 5.8 est idéal. Ce pH dépend du pH de l'eau utilisée mais aussi des malts et minéraux présents.

    Les 3 composants les plus importants sont le Calcium, le Magnésium et des Carbonates.  Viennent ensuite de manière plus subtils les Sulfates, Sodium et Chlorures. Tous sous forme d'ions.

    • pH : un pH de 7.0 indique une eau neutre, au dessus ( > 7.0) l'eau sera alkaline et au dessous (< 7.0) elle serait acide. Mais ce pH a peu d'importance, ce qui compte pour un bon brassage c'est le pH du brassin (eau+malst). Les malts ont tendance a acidifier l'eau (baisser le pH) et ceux d'autant plus qu'il sont "grillés".
    • Calcium (Ca+) : c'est l'élément qui détermine principalement la dureté de l'eau et qui favorise aussi l'activité des enzymes (pour transformer l'amidon du malt en sucres). Le calcium acidifie l'eau ; idéalement entre 50 et 150 ppm pour la bière
    • Magnésium (Mg+) : proche du calcium dans son effet sur la dureté de l'eau, idéalement entre 10 et 30 ppm. Le magnésium est acidifiant. C'est un nutriment important des levures
    • Carbonates (HCO3-/CaCO3) : augmente le pH (plus alcalin) et neutralise l'acidité des malts foncés. Idéalement :
      • de 0 à 50 ppm pour les bières blondes,
      • de 50 à 150 ppm pour les bières ambrées,
      • plus de 150 pour les bières brunes.
    • Sulfates (SO4-) : accentue l'amertume des houblons ; idéalement entre 50 et 150 ppm.
    • Sodium (Na+) : augmente la rondeur des malts, idéalement entre 0 et 150 ppm.
    • Chlorures : accentue le parfum des bières. Idéalement entre 0 et 250 ppm.
    Ces composants permettent de calculer 3 paramètres fondamentaux
    • La dureté de l'eau, est l'indicateur de la minéralisé de l'eau et mesure surtout le Calcium et un peu le Magnésium.
    • L'alcalinité total, est l'indicateur des carbonates, et du pouvoir absorbant à l'acidité du malt. Plus l'alcalinité est forte moins l'acidité du malt aura d'effet sur le pH.
    • L’alcalinité résiduelle, c'est l'alcalinité corrigé de la dureté, car les ions Calcium et Magnésium vont interagir avec les carbonates pour précipiter sous forme de calcaire et ainsi réduire l'alcalinité initiale

    L'eau à Cognac

    au fond le calcaire précipité par
    l'ébullition de 20 litres d'eau de Cognac
    D'abord l'eau dont je dispose (eau du robinet à Cognac), il s'agit d'en connaitre la composition pour déterminer la base de travail. Les infos données au grand public sur la qualité de l'eau se focalise sur l'aspect conformité réglementaire et biologique ; peu de chose sur la composition minérale.
    Après quelques email avec l'ARS (Agence Régionale de Santé, en charge de la qualité de l'eau distribuée) j'ai obtenu des rapports complets, merci à eux.
    • pH : A Cognac avec un pH de 7.3 l'eau est très légèrement acide.
    • Calcium (Ca+) : A Cognac avec de 110 à 120 mg/l l'eau est dure et plutôt dans la fourchette haute.
    • Magnésium (Mg+) : Ici à Cognac de 5 à 6,1 mg/l, un peu en dessous de la fourchette.
    • Hydrocarbonates (HCO3-) : Clairement l'eau de Cognac, avec 300 à 340 mg/l, est plus destinée a brasser des bières brunes ; on peut toutefois en abaisser le taux en précipitant le HCO3- (en portant à ébullition l'eau), on récolte du CaCO3 solide au fond de la cuve.
    • Sulfates (SO4-) : A Cognac, de 23 à 27 mg/l, on se situe donc en dessous de la fourchette, l'amertume des houblons sera légèrement affaiblie.
    • Sodium (Na+) : A cognac on est dans le bas de la fourchette avec 13 à 14 mg/l, cela ne favorise pas la rondeur (il faut plus de malts)
    • Chlorures : A Cognac de 23 à 25 mg/l, plutôt vers le bas de la fourchette.
    Donc en résumé,
    Avec l'eau du robinet de Cognac, on a une eau dure et très alcaline plutôt destinée a faire des bières brunes et ambrées. Il sera difficile de faire une bonne blonde, elle sera particulièrement amer, ce qui oblige a utiliser peu de houblon donc peu de goût. On si on peut toutefois abaisser un peu l'alcalinité en faisant bouillir l'eau au préalable, ce que je fais déjà pour la stériliser et éliminer le gout de chlore.
    Mais c'est largement insuffisant, selon diverses sources il faudrait diluer fortement à l'eau distillée ou ajouter des acides (env. 5 ml d'acide lactique). Une autre solution consiste a utiliser une part de malts acide.

    Ainsi l'eau de Cognac ressemble plutôt à celle de Dublin ou est produit la célèbre Guinness (bière très brune).

    Les autres minéraux ont tendance a abaisser un peu les effets des houblons (amertume et arôme) et des malts (rondeur).

    Après la qualité (sanitaire) globale de l'eau distribuée à Cognac est plutôt bonne, avec une présence importante de chlore mais qui disparait très vite si on fait bouillir ou si on laisse l'eau reposer 1 nuit.

    Toutefois je vais quand même me renseigner sur d'autres sources possible d'eau potable localement (source ou puit) afin de varier et faire quelques expériences.


    1 commentaire:

    1. Bonjour,
      Je vous écris pour une question qui concerne l'utilisation de l'eau de source pour le brassage (ou autres boissons).
      Mais avant ça : bravo pour les aventures et pour le blog !
      C'est chouette de partager vos travaux, ça fait de la ressource pour les autres.

      Pour ma question : je m'intéresse à la possibilité de l'usage d'une eau de source pour la fabrication d'une boisson (pas la bière, je n'en bois pas, eh oui... :) en vue de commercialisation (petite production artisanale).
      Je commence tout juste à chercher des infos, et en trouvant votre billet je me suis demandée si vous aviez des retours d'expérience sur la question, ou si vous connaissiez des personnes dont je pourrais aller récolter le témoignage. Je me dis que dans le milieu des pico-brasseries et micro-brasseries, des gens ont forcément déjà passé cette étape de produire avec une eau de leur source ou de leur puits.
      Voilà.
      Je vous laisse mon mail en mode crypté (Ma boîte mail est déjà bien assez spamée comme ça) :

      a.r/m#e!!l{i]l"l%a (arow-baz) courrier chaud.com

      Bon c'est super codé mais il faut simplement retirer tous les signes de ponctuation ou autres signes atypiques, et ne garder que les lettres.
      Courrier chaud, ça va pour le décodage ?

      Au plaisir de vous lire !

      Armelle

      RépondreSupprimer